Décréter les stats d’urgence !
Avec maintenant le recul nécessaire, les sociologues et les chercheurs du CEVIPOF, le Centre d’Etudes de la Vie Politique Française, peuvent analyser finement les résultats des votes franciliens, au cours de la dernière élection présidentielle, et en tirer des conclusions assez intéressantes.
Mais jugez plutôt, grâce à cette synthèse parue ces jours-ci.
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En banlieue, le vote Sarkozy a culminé dans les zones résidentielles et péri-urbaines en récupérant le vote Le Pen tandis que Ségolène Royal est arrivée en tête dans les cités, bénéficiant du regain de civisme des jeunes et d’un bon report des voix Bayrou.
En Ile-de-France, même si le score du candidat UMP est moindre que nationalement (52,49% contre 53,06), 6 départements sur 8 lui ont été acquis, dont certains avec de très forts pourcentages de voix. Ainsi dans les Yvelines (58,71% des voix) et les Hauts-de-Seine (55,65% des voix) où se concentrent les banlieues les plus riches de France mais aussi dans le département semi-rural de Seine-et-Marne (56,25%). Seuls la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne ont été remportés par la candidate socialiste avec respectivement 56,54 et 50,20% des voix. Pour le démographe Hervé Le Bras, Nicolas Sarkozy a engrangé des gains de voix substantiels au second tour dans la grande couronne – les Yvelines, l’Essonne et le Val-d’Oise – mais surtout dans les zones péri-urbaines de Seine-et-Marne et des départements qui jouxtent l’Ile-de-France, là où le vote Le Pen est bien implanté depuis 1995 : l’Aube (61,69%), la Marne (59,20%), l’Oise (58,30%), l’Eure-et-Loir (58,16%), le Loiret (58,55%). Pour M. Le Bras, « Nicolas Sarkozy a raflé les votes de grande banlieue et du péri-urbain en général ».
Diagnostic confirmé par Bruno Rey, politologue au Cevipof qui parle d’un « dégradé » du vote Sarkozy sur l’Ile-de-France et les départements limitrophes, la zone claire étant Paris où Ségolène Royal a réalisé des scores très hauts dans plusieurs arrondissements, les zones foncées, où Nicolas Sarkozy l’a largement emporté, se situant à la périphérie, « la Seine-et-Marne constituant la jonction ».
La candidate socialiste, souligne par ailleurs Bruno Rey, a obtenu de très bons résultats dans les anciennes banlieues rouges. Ainsi en Seine-Saint-Denis où Ségolène Royal a réalisé 67,9% à Saint-Denis, 67,7% à Montreuil et 54,5% à Aulnay-sous-Bois pourtant acquise à l’UMP. Le report des voix communistes a pleinement joué pour expliquer les scores de la candidate socialiste à plus de 65% dans les villes PCF de Bobigny, Villetaneuse, Saint-Ouen, où Ivry-sur-Seine.
La candidate socialiste a aussi obtenu plus de 55% des suffrages dans les villes à quartiers populaires (Evry, Massy, Grigny en Essonne) y compris dans celles dirigées par un maire de droite (Courcouronnes, Corbeil-Essonnes).
Il semble par ailleurs que Ségolène Royal, en banlieue, ait bénéficié d’un bon report des voix Bayrou, notamment dans le Val-de-Marne et à Drancy (Seine-Saint-Denis) dont le maire Jean-Christophe Lagarde (UDF) est le porte-parole de François Bayrou et où elle devance de cinq points son adversaire (52,53% contre 47,47%).
Pour Vincent Tibéri, également du Cevipof, le « regain civique » que l’on a pu observer dès le premier tour avec, par exemple, une participation en hausse de plus de 30% à Clichy-sous-Bois, « a joué en faveur de la candidate de gauche ».
« Si cet électorat continue à se mobiliser, ajoute-t-il, cela risque de changer la donne dans la couronne parisienne pour les législatives et il y a des chances pour que la représentation politique de la périphérie parisienne ne soit plus la même« .
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Et moi, qui ne travaille pas au CEVIPOF, je m’en vais ajouter à cette dernière phrase : « Mais c’est que j’y compte bien ! »
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