Des sous en moins à mieux employer…
Si vous êtes un tant soit peu en phase avec l’actualité nationale, vous savez certainement que M. Claude Bartolone, Président de l’Assemblée Nationale, a décidé d’entreprendre un grand chantier durant le temps de son mandat : il veut une chambre basse parlementaire beaucoup plus « transparente« , plus « exemplaire« , plus « ouverte » et plus « utile« , pour reprendre ses termes.
Pour ce faire, il se propose de faire adopter toute une série de mesures, qui vont donc toucher les 577 députés en général et notre Député-Maire-ex-ARES-PR-plus-UMP-UDI-Avocat-346-544 en particulier.
Le discours de M. Bartolone se trouve ici, dans son intégralité :
http://presidence.assemblee-nationale.fr/media/conference-de-presse-du-president-claude-bartolone
Je vous propose aujourd’hui de détailler un peu tout ce qui a de bonnes chances de changer.
La mesure la plus symbolique est évidemment la baisse de 10% de l’IRFM, l’Indemnité de Représentation et de Frais de Mandats que percevait chaque parlementaire.
Dorénavant, Yves Jégo, comme ses collègues, et si la mesure est adoptée, devra voir cette indemnité baissée de 10%, et devra réaliser une déclaration sur l’honneur quant au bien fondé de son utilisation. (Je pense pour ma part que peu de parlementaires déclareront sur l’honneur que l’utilisation de cette indemnité a été mal employée… Mais bon…)
A l’heure actuelle, l’IRFM s’élève à 6412 euros par mois.
Son but initial est de permettre aux députés de « faire face aux diverses dépenses liées à l’exercice de leur mandat qui ne sont pas directement prises en charge ou remboursées par l’Assemblée« . Comme par exemple, payer le loyer d’une permanence, des fournitures, des frais de bouche lors des déplacements, etc.
Elle est virée sur un compte bancaire à part, et elle s’ajoute à la rémunération du député (7100 euros bruts par mois) et à l’enveloppe de 9138 euros qui paye ses collaborateurs.
En fin d’année, les députés peuvent reverser une part plafonnée de ce dernier budget vers l’IRFM.
Ca, c’est la théorie.
Dans la pratique, l’IRFM sert parfois à des usages très « domestiques « , très « personnels », on l’a encore vu récemment avec le député socialiste de l’Ardèche Pascal Terrasse (il faut savoir balayer devant sa porte, sans jeu de mots) qui vient d’être accusé d’avoir financé des voyages pour sa famille, etc, etc…
On sait aussi que parfois, l’IRFM sert à certains députés à se constituer un patrimoine immobilier.
Si l’on en croit la Commission pour la transparence financière de la vie politique, certains élus « stockent » ce qu’ils ne dépensent pas sans même songer à rendre leur reliquat en fin de mandat – jusqu’à 200 000 euros accumulés en cinq ans seulement.
Ce qui en fin de mandat, permet à certains députés de faire quelques « cadeaux » financiers dans certains petits villages de leur circonscription pour financer tel ou tel projet, dans l’hypothétique idée de faciliter leur réélection.
(Je parle toujours de manière générale sans viser personne, bien entendu.)
On pourra relire avec intérêt le papier daté de 2011, paru dans l’Expansion / l’Express, organes peu réputés gauchisants, un article intitulé « Les astuces des élus pour arrondir leurs fins de mois » :
Intéressant, non ?
Alors, bien évidemment, on peut regretter que M. Bartolone n’ait pas poussé la logique jusqu’au bout.
On aurait peut-être aimé que l’IRFM fût contrôlée par le fisc, ou la Cour des Comptes, afin de contrebalancer un peu la déclaration sur l’honneur dont je vous parlais un peu plus haut….
On aurait peut-être également aimé plus de transparence concernant les emplois familiaux.
René Dosière, député PS spécialiste des finances de l’exécutif en France, dans son dernier livre, « l’Etat au régime », que je vous recommande chaudement, évalue à 13 % ce nombre d’emplois familiaux à l’Assemblée nationale…
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Dosi%C3%A8re
Et puis, il y a la réserve parlementaire…
Ah ! La réserve parlementaire !
L’an passé, ce sont 90 millions d’euros, tirés sur une ligne de crédits du ministère de l’intérieur qui ont été mis à la disposition des 577 députés.
Ils se répartissent entre eux cette “réserve parlementaire”, selon des critères opaques (d’ancienneté, d’étiquette politique, d’influence, etc.)
Là encore cette manne (je vous laisse faire la division…) permet également en fin de mandat de financer tel ou tel projet de sa circonscription, de façon tout à fait discrétionnaire, favorisant parfois le clientélisme… (Cf un peu plus haut, et je rappelle que je ne vise personne en particulier)
On aurait bien entendu aimé qu’une totale transparence fût faite…
M. Bartolone a parlé « d’évolution », pas de « révolution.
C’est sans doute mieux que rien.
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Avant de vous quitter pour aujourd’hui, je vous donne les références du livre cité dans mon papier du jour :
René Dosière – « L’état au régime » – Editions du Seuil – Paru le 20/09/2012
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Le blog de M. Dosière :
http://renedosiere.over-blog.com/
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